En s’inclinant sur le score de 2 buts à 1 dans le derby breton face au FC Lorient lors de la 9ᵉ journée, le Stade Rennais a une nouvelle fois fait preuve de fébrilité sur l’aspect défensif. Même constat lors du match nul face au RCSA la journée suivante, avec une défense apathique sur l’égalisation de Mothiba ou sur le premier but niçois, il y a deux jours. Outre quelques failles techniques, c’est davantage la fragilité défensive de l’effectif qui semble poser problème chez les Rouge & Noir. Décryptage.
Un mercato pas assez développé en défense ?
Qu’on se le dise, en attirant Florian Maurice en Bretagne, le Stade Rennais s’est attaché les services d’un homme passionné, dévoué et qui connaît très bien le football. Si le club affiche une balance de transferts très équilibrée depuis quelques années et une renommée de plus en plus accrue en Europe, c’est en partie par les coups de maître réalisés par le natif de Sainte-Foy-lès Lyon. Nous avons notamment en tête le transfert de Nayef Aguerd vers West Ham (35 M€), le récent départ de Jérémy Doku pour Manchester City (60 M€) mais également les arrivées des très expérimentés Steve Mandanda et Nemanja Matic, ou encore les signatures de Ludovic Blas et Enzo Le Fée chez les voisins lorientais et nantais.
Pourtant, malgré deux belles saisons précédentes et des objectifs tout de même atteints, les suiveurs du Stade Rennais sont unanimes sur le même constat : il semblerait qu’il y ait trop peu d’armes défensives dans l’effectif breton.
Un élément frappant ressort dans un premier temps, à savoir le nombre de défenseurs dans le groupe de Bruno Génésio. Sans véritable recrutement à ce poste cet été (mis à part les intégrations de Mohamed Jaouab et Jérémy Jacquet), le club a dû être contraint de voir 4 éléments défensifs quitter le club : Joe Rodon (retour de prêt Tottenham), Djed Spence (retour de prêt Tottenham, arrivé en janvier), Hamari Traoré (fin de contrat, Real Sociedad) et Birger Meling (FC Copenhague), sans pour autant combler ces départs.
La petite lueur d’espoir émerge sur les côtés, avec le constat que Jeanuël Belocian et Guéla Doué, purs produits rennais, sont les doublures naturelles de Lorenz Assignon et d’Adrien Truffert. Même si cette lueur se caractérise par une moyenne d’âge de 20 ans pour les couloirs bretons. Cependant, et en vertu de son indéniable talent, la jeunesse rennaise peut aussi, ne pas être à la hauteur des attentes…
Des jeunes trop rapidement plongés dans le grand bain ?
L’ADN Rouge & Noir puise sa force dans sa formation, à juste titre puisque le Centre de Formation rennais a une nouvelle fois décroché la 1ʳᵉ place (avec 4,2 étoiles) des centres les plus performants en 2022-2023, balayant tous les aspects des parcours de formation de ses jeunes joueurs.
Cependant, au rythme des matchs qui s’enchaînent et de la compétitivité de l’Europa League notamment, le SRFC a-t-il trop donné de responsabilités à ses jeunes et pas suffisamment misé sur sa solidité défensive ? Cela peut poser des questions.
En date, le 16ᵉ de finale retour contre le Shakhtar Donetsk. On se souvient malheureusement de la malchance frappant Jeanuël Belocian. La qualification quasiment acquise après un but libérateur d’Ibrahim Salah en prolongation, c’est finalement sur un ballon dévié dans son propre but par le jeune défenseur qui le conduira, lui et ses coéquipiers, vers une cruelle séance de tirs au but perdue par les Rennais.
On peut également citer le cas de Warmed Omari. Le défenseur, originaire du quartier de Villejean, s’est révélé lors de l’exercice 2021-2022 aux côtés de Nayef Aguerd. Avec 40 matchs disputés, il a réalisé une première saison aboutie, marquée par des prestations de haut vol, notamment lors des victoires à domicile face au PSG (J9) et face à l’OM (J37). Cependant, au fil des titularisations, quelques pertes de balles et un léger côté nonchalant ont rapidement commencé à inquiéter les supporters.
➡️ Malheureusement notre chroniqueur @LeoToudone
avait vu juste lors du dernier #LeDebriefRR avec ce constat qui se répète chaque week-end…⬇️⬇️⬇️ https://t.co/Yp0czFiYeE
— Radio Roazhon (@RadioRoazhon) November 5, 2023
Fautif sur les deux buts lorientais le 22 octobre dernier, Warmed Omari, reconduit en défense centrale face au Panathinaikos, aura eu le mérite de réaliser une bonne prestation, avant de retomber dans ses travers et une expulsion face au Gym, amenant le but de Sofiane Diop, formé au club. À noter qu’il sera suspendu face à l’OL à l’occasion de la prochaine journée, tout comme Lorenz Assignon.
Des erreurs de jeunesse, cruelles à encaisser, mais qui forgent néanmoins le caractère de nos jeunes talents. La preuve avec la très grosse prestation également de Jeanuël Belocian face au Pana. Le défenseur gaucher de la formation bretonne aura réussi à museler les attaquants grecs tout au long de la rencontre. En dépit de quelques erreurs assez répétitives, le Stade Rennais a-t-il raison de mettre « All-In » sur sa formation ? Naïveté ? Manque d’expérience ? Le débat continue.
La charnière, axe d’amélioration prioritaire ?
Il est vrai qu’en évoquant les difficultés défensives du Stade Rennais, c’est davantage la charnière centrale qui interroge. En effet, depuis de nombreuses saisons, le couloir droit semble être le plus performant. Avec 6 années de (très) bons et loyaux services, on peut facilement avancer qu’Hamari Traoré a largement rempli sa mission.
Un constat un peu différent sur l’aile gauche. Outre les différents actuels gauchers que nous avons évoqués un peu plus tôt, nous devons évidemment mettre en lumière le passage de Ramy Bensebaini, bourreau de Kylian Mbappé lors du sacre de 2019, auteur de 3 belles années en Bretagne. Adrien Truffert, Faitout Maouassa et Birger Meling se sont ensuite partagés la place d’arrière gauche jusqu’aujourd’hui.
Arrivés à l’été 2022, Arthur Theate et Christopher Wooh, demeurent les interrogations du moment. Tous deux débarqués sur le tas à la Prévalaye, les deux joueurs connaissent des trajectoires étonnantes. Le premier, international belge, a tout d’abord été recruté pour palier le départ de Nayef Aguerd. Positionné en tant que défenseur central gauche, l’ancien joueur de Bologne s’impose rapidement comme un titulaire, démontrant une certaine hargne. Une hargne qui peut s’avérer un peu trop impulsive, à l’image de la dispute entre le joueur et son entraîneur lors de la rencontre face à Angers, l’an dernier. Dispute oubliée, Theate semble en perdition. Un constat qui se caractérise par une quatrième rencontre démarrée sur le banc face à Nice, après Lorient, Panathinaikos et Strasbourg.
À propos de Christopher Wooh, il est plus difficile d’analyser la situation. Jamais blessé, l’ancien lensois n’entre pas du tout dans les plans de Bruno Génésio, qui ne l’a utilisé qu’à 18 reprises depuis son arrivée. Plutôt bon lorsqu’il a joué, buteur face au Dynamo Kiev il y a un an et face au Havre cette année, le Camerounais continue de cirer le banc, malgré les mauvaises prestations de son partenaire Omari. Une énigme.
Les défenseurs, une denrée rare dans le football moderne
Dans le football d’aujourd’hui, ce sont des millions d’euros qu’investissent les clubs, généralement pour des joueurs avec des profils offensifs. Cependant, quelques exemples viennent démontrer que pour réussir une grande saison, il faut aussi savoir se construire une colonne vertébrale très costaude. Le Manchester City de Pep Guardiola, remportant 3 trophées l’an passé (Premier League, Ligue des Champions, FA Cup), en est la parfaite illustration.
Laissons parler les chiffres : 55M€ dépensés pour s’attacher les services de John Stones, 68M€ pour Ruben Dias en provenance de Benfica ou encore 90M€ pour Josko Gvardiol de Leipzig. Des sommes que ne peut évidemment pas débourser le club du président Olivier Cloarec à l’heure actuelle, mais qui sont le symbole de la volonté des Citizens de capitaliser sur de jeunes défenseurs très prometteurs. Un gage de réussite quand on voit la saison 2022-2023 qu’ont réalisé les Mancuniens.
On peut donc facilement conclure en avançant que le Stade Rennais s’est souvent mordu les doigts sur son recrutement défensif. Outre les échecs cinglants des signatures de Dalbert ou Daniele Rugani, nous pouvons également évoquer de nombreuses déceptions à l’image de Loic Badé, la tentative Samuel Umtiti, le loupé Kim Min-Jae, pour ne citer qu’eux…
Aux plus fidèles supporters Rouge & Noir, avez-vous aussi un brin de nostalgie qui surgit lorsqu’on vous rappelle aux bons souvenirs de Mario Melchiot, Jean-Joel Perrier-Doumbé, John Mensah, Petter Hansson, ou encore Romain Danzé ?
Paul LEMONNIER